Management de l'Inattendu


la complexité au sein des systèmes richement organisés

Insuffler de la qualité aux interactions au sein de l’organisation
Insuffler de la qualité aux interactions au sein de l’organisation

DÉMARCHE

 

Le corpus théorique relatif à la haute fiabilité organisationnelle s’est construit à partir de l’étude du fonctionnement des organisations complexes[1] devant faire face à des environnements à hauts risques. En d’autres termes, il s’agit d’organisations non pas fiables par nature, mais qui ont une exigence de fiabilité importante qui pèse sur elles en raison d’enjeux extérieurs fortement liés à leur activité (Bourrier, 2001).

[1] Les organisations complexes sont des organisations présentant une extrême quantité d’interactions et d’interférences entre un très grand nombre d’unités. Elles sont également sujettes aux incertitudes, aux indéterminations et au caractère aléatoire de leur environnement et des situations qu’elles doivent affronter. « La complexité a ainsi toujours à faire avec le hasard. Mais il s’agit d’incertitude au sein de systèmes richement organisés » (Morin, 1990, p. 48-49).

 

TRAVAUX

 

Les travaux de Weick et Sutcliffe (2001) sur les organisations nécessitant une grande fiabilité mettent en avant cinq  processus  clés  permettant de maintenir, au quotidien, un management de l’inattendu :

 

•  l’attention portée aux échecs plutôt qu’aux succès;

•  la méfiance envers la simplification des interprétations;

•  la sensibilisation aux opérations (et leur caractère délicat, voire incompatibilité relationnelle inter-opérateurs);

•  l’obligation de résilience;

•  la déférence envers l’expertise, pour garantir la fluidité du système de prise de décision.

 

STRATÉGIES DE GESTION

 

Pour une gestion de l'inattendu, qui de manière intrinsèque repose sur une dangerosité persistante pouvant être aléatoire, cyclique ou permanente trois solutions se présentent.

 

Tout d’abord, l’option de retrait, permet de contourner le problème en quittant tout simplement le territoire (secteur de marché) dangereux de manière temporaire ou définitive (Loi Barnier, 1995; Royer, 2001).

 

L’adaptation somatique consiste à des ajustements fins, à la marge, permettant de traiter les problèmes de manière ciblée tout en conservant le mode de fonctionnement général du système. Elle correspond à un processus d’apprentissage en deux étapes : crise-apprentissage (ce qui représente une simple boucle d’apprentissage, selon les termes d’Argyris, 1977). Elle peut se résumer par l’expression courante : « toujours plus de la même chose ».

 

L’adaptation génétique désigne une transformation fondamentale du système, une ré-genèse à travers un processus d’apprentissage en trois étapes : crise-désapprentissage-réapprentissage (ce qui réfère à une double boucle d’apprentissage, selon les termes d’Argyris, 1977).

 

LIMITES IDENTIFIÉES

 

La notion d’appartenance à une culture, à un territoire, s’oppose à celle d’« étranger » pour laquelle certaines formes d’incommunicabilité bloquent le système d’interactions. Comme le cerveau humain qui fonctionne sur des chemins déjà battus, toute organisation ne peut pas assimiler des changements qui dépassent 20% de leur périmètre stable (l'optimal serait le 12%, en sachant qu'en-dessous de 10%, il y a un sentiment somatique de tourner en rond).

 

La fluidité du système de prise de décision est loin d’être garantie, quand des intérêts conflictuels structurent les rapports de pouvoir au sein de l'organisation.

 

Car les perspectives des « experts » et des « profanes » devraient plutôt s’éclairer mutuellement dans le cadre d’un processus bilatéral déjà préétabli au sein de l'organisation.

 

Les fondements et les critères d’une distinction claire entre les perceptions basées sur la morale et les valeurs, et celles résultant d’erreurs cognitives demandent à être explicités, voire structurés dans un processus d'aide à la décision.

 

OPPORTUNITÉS

 

La modernité se caractérise par l’existence des mécanismes de déracinement des activités sociales d’une part (phénomène de disembedding, en lien avec une distanciation temporelle et spatiale) et de ré-enracinement (reembedding) d’autre part (Giddens, 1990).

 

La gestion de l’inhérence, sous ces diverses formes, nécessite le développement d’un mode de connaissance approprié et spécifique avec l’obligation d’une réflexion sur le passage de modes d’adaptation somatiques à une transformation génétique.

 

La capacité du manager à introduire volontairement de la dissonance, de l’inattendu, dans son analyse, constitue un exercice de style profitable à un désapprentissage-réapprentissage permanent.

 

En ce qui concerne l’inhérence cyclique, il convient d’instaurer un désapprentissage-réapprentissage véloce et permanent. En effet, le caractère cyclique du changement n’implique pas la réplication des situations de risque. Car aucune crise ne se ressemble, même quand une crise est considérée comme cyclique

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